DISTIMACC – Diversité, stabilité et fonctionnement des écosystèmes forestiers : quelle ingénierie et quels mélanges pour l’adaptation au changement climatique, de la Provence aux Alpes du Nord ?
DISTIMACC – Diversité, stabilité et fonctionnement des écosystèmes forestiers : quelle ingénierie et quels mélanges pour l’adaptation au changement climatique, de la Provence aux Alpes du Nord ?
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Coordinateur : Xavier Morin (CNRS Montpellier).
Partenaires :
CEFE (CNRS) Montpellier,
IRSTEA Grenoble,
ONF R&D Paca et Rhône-Alpes,
AMAP (INRA, CIRAD) Montpellier.
Mots clés :
Résilience, régénération, productivité, décomposition des litières, variabilité individuelle, traits fonctionnels, mélanges, sylviculture, adaptation, modélisation mécaniste, gradient climatique.
Voir colloque final 2018 Voir séminaire intermédiaire 2014 Voir séminaire interne 2014
Les changements globaux affectent les processus écosystémiques des forêts et les services qui en découlent, en modifiant les conditions environnementales. Ils influencent également indirectement les écosystèmes forestiers en modifiant la composition des communautés. Or, de tels changements de biodiversité sont susceptibles d’affecter le fonctionnement des écosystèmes, puisque les processus écosystémiques – comme la productivité, la décomposition et le recyclage des nutriments – sont particulièrement sensibles à la diversité en espèces. Le rôle de la diversité sur le fonctionnement des écosystèmes forestiers a en effet été démontré de diverses façons, aussi bien expérimentalement que via des observations in situ. Mais s’il existe de nombreux travaux sur la relation entre diversité et le niveau moyen atteint par un processus donné (productivité ou décomposition par exemple), peu d’études ont cherché à estimer l’effet de la diversité sur la stabilité de ces processus écosystémiques. Cette stabilité concerne la capacité d’un écosystème forestier à maintenir sa structure et ses propriétés après une perturbation ou un stress (stabilité par résistance), et aussi sa vitesse de récupération (stabilité par résilience). Ce manque de connaissances sur la stabilité des écosystèmes est particulièrement criant pour les écosystèmes forestiers ; et les inconnues sont encore plus grandes si l’on considère l’interaction entre effet de la diversité et effets du changement climatique. Pourtant, dans ce contexte de changement climatique, mieux connaître la résistance des peuplements et leur résilience semble primordial, que l’on se place du point de vue de la conservation de diversité à l’échelle locale ; ou du point de vue du gestionnaire, pour qui la préservation de services écosystémiques (e.g. production) au cours du temps est aussi importante que la recherche d’un gain de productivité ponctuel. Sous cet angle appliqué, un point clé est l’identification de mélanges qu’il serait intéressant de maintenir ou même de favoriser pour l’adaptation des forêts au changement climatique.
Partant de ces constats, ce projet vise (i) à apporter de nouvelles connaissances sur l’effet de la diversité ligneuse (arbustes inclus) sur la stabilité des écosystèmes forestiers, et ce sous différentes conditions climatiques ; (ii) à identifier les types de mélanges qu’il serait intéressant de maintenir ou de favoriser pour l’adaptation des forêts au changement climatique dans les zones de montagne et méditerranéenne ; et (iii) à développer un savoir-faire en ingénierie forestière sur les conditions techniques de maintien ou de promotion de ces mélanges. Ce projet se focalisera sur la région méditerrano-alpine, région où se trouvent de nombreux types forestiers identifiés comme sensibles au changement climatique. Un tel projet améliorera nos connaissances fondamentales sur la stabilité des forêts face aux facteurs climatiques et sa dépendance vis-à-vis de la diversité. Il renseignera également sur les essences et mélanges d’intérêts, ainsi sur que les pratiques sylvicoles les plus favorables. Le projet comportera donc des recommandations de gestion en fonction des résultats obtenus à la fois grâce aux mesures et aux simulations et également par une démarche d’ingénierie des mélanges pour définir des pistes de gestion pour l’adaptation des forêts au changement climatique.
Nous étudierons donc la réponse – à la diversité et au climat – de deux processus écosystémiques clés, la croissance des arbres et la décomposition des litières, ainsi que de la régénération, processus démographique crucial dans le contexte de changement climatique. Plus précisément, après avoir vérifié que (i) la croissance moyenne des peuplements et la décomposition des litières augmente avec la diversité (intra- et inter-spécifique) des ligneux, nous testerons (ii) si la stabilité de la productivité et de la décomposition des peuplements augmente avec la diversité (intra- et inter-spécifique) des ligneux, (iii) si l’effet du mélange est plus fort dans les conditions environnementales plus stressantes, et (iv) si la régénération est favorisée par la diversité des espèces et de la structure du peuplement notamment en conditions climatiques plus stressantes.
Pour ce faire, ce projet reposera sur trois volets complémentaires. Tout d’abord des mesures in situ en considérant des gradients climatiques (gradients latitudinaux nord-sud, gradients altitudinaux, en Provence et dans les Alpes) et différentes conditions de mélanges. Puis une approche de modélisation pour étudier la relation diversité-stabilité, grâce à un modèle de dynamique forestière. Cette approche doit permettre de confirmer les effets constatés in situ, et d’essayer de les décomposer pour en comprendre les mécanismes. Enfin, une démarche d’ingénierie forestière associant chercheurs et gestionnaires du projet qui s’appuiera sur une synthèse bibliographique sur les mélanges d’intérêt et sur la conduite de ces mélanges, ainsi que sur un travail de simulation de modalités de gestion de ces mélanges, à l’aide du modèle, selon certains scénarios d’évolution climatique.
Outre l’effet positif du mélange sur la productivité moyenne, la vitesse de décomposition et le succès de la régénération, on s’attend à ce que l’effet positif du mélange sur ces processus soit plus fort lorsque la variabilité intra-spécifique est faible. On s’attend également à ce que cette situation se rencontre plus souvent en conditions plus stressantes, avec une sécheresse estivale par exemple. Le modèle doit permettre d’explorer les mécanismes pouvant expliquer ces effets (au niveau de la productivité essentiellement), comme par exemple l’asynchronie de la réponse des espèces aux conditions environnementales. Enfin ce projet doit permettre de tester la mise au point de scénarios sylvicoles pour les différentes situations écologiques d’intérêt, en identifiant les essences impliquées et les modes de gestion utilisés.
Le projet se déroulera sur 3 ans et demi, avec notamment trois saisons de terrain. Il débutera notamment par un workshop initial qui doit permettre une réflexion en amont pour les aspects opérationnels du projet (terrain, simulations) et anticiper le transfert vers la gestion.
Ce projet bénéficiera d’interactions avec d’autres projets, qu’ils soient nationaux ou internationaux, principalement ceux qui portent sur l’importance des effets de la diversité sur les processus écosystémiques et/ou sur l’impact des changements globaux sur les patrons de diversité (à différentes échelles spatiales). En particulier, il est important de noter que le projet profitera des données acquises dans le projet BioProFor (ANR, 2012-2014) et de l’outil de modélisation initié dans le cadre du projet BACCARA (EU FP7) et amélioré via le projet EC21C (BiodiverSa, 2013-2016), ainsi que des acquis des projets portant sur les forêts mélangées (RESINE, GEFORHET, ECOGER).
Enfin ce projet se caractérise par une approche originale liant observations et modélisation, tout en proposant une interaction forte entre chercheurs et gestionnaires pour définir une démarche d’ingénierie des mélanges originale, et proposer des pistes de gestion pour l’adaptation des forêts au changement climatique.