Flux et introgressions génétiques entre espèces forestières : le cas du chêne liège avec les autres espèces de chênes méditerranéens dans les peuplements français

Flux et introgressions génétiques entre espèces forestières : le cas du chêne liège avec les autres espèces de chênes méditerranéens dans les peuplements français

Une synthèse des acquis de ce projet est disponible dans l’ouvrage recueil des résultats des projets  financés par les deux premiers appels à propositions de recherche (1997 et 2000).

Coordinateur : Roselyne Lumaret (CNRS).

Partenaires :
ONF (STIR PACA et Languedoc-Roussillon),
Institut Méditerranéen du Liège,
IRD.

Voir colloque final

Les objectifs du projet étaient les suivants :

– établir, à l’aide de marqueurs génétiques diagnostiques nucléaires et cytoplasmiques (modalités différentes pour les deux espèces lorsque celles-ci se trouvent en populations pures), dans les quatre régions comportant des subéraies (Catalogne, Landes, Provence et Corse), un bilan précis de l’importance géographique de l’introgression génétique entre le chêne-liège et le chêne vert et déterminer la direction privilégiée de ces introgressions ;
– rechercher si certains individus de chêne liège introgressés présentent des caractéristiques écophysiologiques intéressantes en vue de leur utilisation en repeuplements ;
– proposer des stratégies de gestion forestière en fonction des situations locales et des objectifs de restauration ou d’extension des forêts.

Résultats

Les résultats de l’étude génétique montrent clairement que l’importance des échanges génétiques entre les deux espèces de chênes est très variable selon les régions et que l’on peut distinguer trois situations :
dans le Sud-Ouest et en Provence continentale où les contacts directs entre les deux espèces sont très réduits géographiquement, aucune trace d’introgression nucléaire ou cytoplasmique, dans quelque sens que ce soit, et aucun individu morphologiquement intermédiaire (d’origine hybride très récente) n’a été mis en évidence. Si ces échanges génétiques existent, ils ne peuvent qu’être très réduits ;

en Corse et en Provence insulaire (îles d’Hyères et presqu’île de Gien) où les contacts entre espèces sont plus fréquents et où le chêne vert est prédominant, une introgression interspécifique cytoplasmique et nucléaire est observée dans les deux sens. L’introgression cytoplasmique est un peu plus importante dans le sens « génome du chêne vert dans le chêne liège ». L’introgression nucléaire est équivalente dans les deux sens. Quelques individus morphologiquement intermédiaires (d’origine hybride récente) ont été également identifiés. Cependant, dans ces deux régions, l’introgression reste toujours très limitée (inf. 10% des individus et le plus souvent 1 à 2%) et pourrait être expliquée par une extension relativement récente (au cours des derniers siècles) du chêne liège dans des régions à prédominance naturelle du chêne vert ;

en Catalogne française, dominée par le chêne vert mais où les contacts interspécifiques sont fréquents et étroits (mélanges d’essences dans de nombreuses stations), tous les chênes verts mais aussi tous les chênes lièges des 34 sites analysés, sans exception, possèdent une molécule d’ADN chloroplastique caractéristique du chêne vert. Cette introgression cytoplasmique totale, également observée en Catalogne espagnole, est certainement très ancienne. En outre, dans cette même région, on observe dans de nombreuses populations mixtes, une assez forte introgression nucléaire dans les deux sens (20-30% des individus ont des allèles de l’autre espèce) et une proportion non négligeable d’individus d’origine hybride récente.

Les résultats des analyses écophysiologiques, publiés en partie (Staudt et coll. 2004), peuvent être résumés comme suit :

quelle que soit l’origine régionale des individus, les deux espèces se distinguent bien par la température critique (plus élevée chez le chêne vert) au delà de laquelle le photosystème II est fortement inhibé, les potentiels (plus élevé chez le chêne liège), les profils d’émissions de monoterpènes et la masse surfacique des feuilles ;

les différences physiologiques entre espèces sont globalement plus faibles en Catalogne qu’en Provence. Pour les deux régions, si la presque totalité des 20 individus issus d’hybridation interspécifique (d’après les marqueurs génétiques diagnostiques) ont des caractéristiques physiologiques de l’espèce identifiée morphologiquement, l’un, au moins, provenant de Catalogne, présente un profil d’émission identifié uniquement dans l’autre station et espèce. Des analyses portant sur d’avantage d’individus et de sites de Catalogne sont nécessaires pour confirmer ce résultat prometteur.

Vous aimerez aussi...